Septembre 2021, je pars pour 6 jours de randonnée dans le parc national des Ecrins, en autonomie. C’est à dire que j’ai de quoi manger, dormir où je veux et de quoi palier aux imprévus qui peuvent survenir en montagne.

Je décide de mon itinéraire au jour le jour, improvisant selon mes envies ou mon état de fatigue, avec tout de même dans l’idée d’aller passer une nuit au refuge Adèle Planchard pour découvrir les paysages qu’on peut avoir à 3000m d’altitude et vérifier que je ne suis pas spécialement sensible au mal des montagnes.

Ci-dessous le trajet que j’ai effectué ; les ronds bleus marquent les endroits où j’ai passé la nuit. Vous pouvez voir le parcours en détail ici : https://www.calculitineraires.fr/index.php?id=1194569#map

Jour 1

9,3 km | 1033m de dénivelé positif | 224m de dénivelé négatif

Je pars d’Argentière-la-Bessée. Pourquoi ? Parce que j’ai trouvé un covoiturage qui peut m’y déposer. Le conducteur qui connaît bien le coin me conseille de monter au col de la Pousterle après lequel se trouve un joli plateau où je pourrait bivouaquer facilement. Au final je pousse un peu plus loin et trouve un super spot !

Pour dormir, j’ai choisi d’utiliser un tarp : Un grand rectangle de toile imperméable, quelques ficelles. Je confectionne des sardines avec des branches prises sur place. Dans un lieu “ouvert” comme sur la photo ci-dessous, je rajoute deux ou trois bâtons pour que le milieu soit surélevé, et me voilà avec une protection contre la pluie et le vent.

Avantages :

  • Bien plus léger qu’une tente
  • Adaptable : On peut faire un abri assez ouvert s’il fait bon, plus fermé pour se protéger d’un vent fort, un simple toit en hauteur pour se protéger de la pluie lors d’un pique-nique en journée…

Inconvénients :

  • C’est long à monter. Bien sur avec l’habitude on va plus vite mais quand même, c’est un peu galère surtout seul.
  • La condensation d’humidité à l’intérieur m’a pas mal gêné

La prochaine fois je pense essayer la tente pyramide de DD Hammocks (si je trouve le budget pour me l’offrir).

Jour 2

16,7 km | 1068m de dénivelé positif | 1589m de dénivelé négatif

Grosse journée, trop de dénivelé pour mes genoux, je sens que j’ai un peu forcé. J’ai galéré à trouver un espace plat pour dormir, pour finir par arriver dans une aire de camping gratuit, plutôt une bonne surprise.

Mais les paysages magnifiques valent bien le coup de se fatiguer, ainsi que la rencontre avec pas mal d’animaux sauvages : Un renard qui ne m’a pas entendu m’approcher, un écureuil curieux qui est venu à quelques mètres de moi, et plusieurs marmottes sifflant à mon approche.

Je fais moins le malin lorsque je croise des troupeaux ; de vaches car leur taille m’impressionne, de moutons car je ne tiens pas à attirer l’attention des chiens de protection. Plus d’une fois je fais un peu de hors-piste pour contourner un troupeau qui squatte le chemin.

Jour 3

19,6 km | 1352m de dénivelé positif | 491m de dénivelé négatif

Je traverse le village de Vallouise au petit matin, j’attends un peu que la supérette ouvre pour me faire un petit dèj sympa. Côté nourriture, j’ai de quoi tenir une semaine dans mon sac : Riz, pâtes, lentilles, de l’avoine pour le petit dèj, des noix et fruits secs. Un peu de chocolat pour le moral, quelques sachets de thé pour quand il fait froid. Les fruits et légumes sont trop lourds et s’abîment vite, mais quand je croise un village j’en prends un peu pour la journée. J’ai aussi cueilli pas mal de baies sauvages (framboises, myrtilles, groseilles…), je ne m’attendais pas à en trouver autant en septembre.

En parlant de cuisson, il faut que je vous présente le Happy Stove ! C’est un petit réchaud à bois constitué de petites plaques de métal à assembler. Une fois rangé il prend vraiment très peu de place, et à moins d’être très en altitude là où plus aucun arbre ne pousse, je trouve toujours du combustible. Comme c’est un foyer fermé, c’est bien moins dangereux qu’un feu de camp, et c’est autorisé dans certains endroits où les feux sont interdits. À vérifier au cas par cas, et il faut malgré tout prendre les précautions d’usage quant aux feux (éviter le vent car des petits bouts de braise peuvent tout de même être emportés, bien éteindre les cendres avec de l’eau lorsqu’on a terminé, etc).

Après un petit dèj de luxe dans un cadre de rêve, je commence l’ascension vers le col de l’Eychauda. Les montagnes sont hautes et massives, les paysages à couper le souffle me font oublier ma fatigue et je ne m’arrête plus de marcher.

En haut, la vue sur la vallée et le village de Monétier-les-Bains me scotche un long moment. Je descend un peu et établis mon campement près d’une station de ski, déserte en cette saison.

Jour 4

14,4 km | 948m de dénivelé positif | 759m de dénivelé négatif

J’ai dans l’idée de me reposer ce jour-là, même si au final je vais quand même faire de gros dénivelés. Après un passage au fond de la vallée, je remonte vers le lac de la douche. Un nom parfait pour évoquer un autre aspect de la rando : Se laver !

Il y a une époque où je ne supportais pas de me baigner dans l’eau froide, même la mer à 20 degrés c’était dur et j’avais du mal à apprécier. Mais quand on passe des jours voire des semaines sans croiser de douche, y’a un moment où il faut se plonger dans le torrent. Et à force on s’habitue. Bon là, l’eau est tellement froide que ça fait mal d’y plonger la main 10 secondes alors il faut un peu de volonté, mais c’est tonifiant !

Côté lessive, je lave mes vêtements au savon de Marseille (un des moins polluants) et espère avoir ensuite assez de soleil pour que ça sèche… En ce quatrième jour de marche c’est l’occasion de faire une bonne pause : Après une petite sieste je sors mon bouquin. J’emmène toujours un livre, même si c’est un peu lourd (je ne fais pas d’effort non plus, j’aurai pu en prendre un qui fait moins de 1000 pages).

Après le lac, je pousse presque jusqu’au col d’Arsine. Le torrent est magnifique, par contre le vent souffle fort. Je prends le temps qu’il faut pour trouver un endroit un peu abrité entre de gros rochers et ferme presque complètement mon tarp. Il fait assez froid, je suis à 2300m, plus aucun arbre ne pousse à cette hauteur.

Un berger dont j’ai croisé la cabane rentre son troupeau. Le chien de protection passe me dire bonjour (il semblait surtout intéressé par ma bouffe).

Jour 5

15,6 km | 1436m de dénivelé positif | 603m de dénivelé négatif

J’approche de la fin de mon séjour. Si je vais au refuge, c’est ce soir. J’hésite un peu, j’évalue mon état de fatigue car l’ascension sera éprouvante. De plus je n’ai pas capté de réseau depuis plus de 24H, et j’ai promis de tenir ma copine au courant, je fais donc un petit détour pour m’approcher du village le plus proche et pouvoir envoyer un sms.

Les dangers de la montagne sont nombreux et il faut être particulièrement prudent lorsqu’on voyage seul. Une bonne pratique dans ce cas me semble d’informer quelqu’un régulièrement d’où on est et où l’on va, afin qu’en cas de problème les secours puissent être orientés vers une zone précise.

J’arpente le fond d’une vallée entourée de sommets vertigineux qui montent pour certains à près de 4000m. Les marmottes sont très présentes et leurs sifflements font partie intégrante du fond sonore. L’idée de monter si haut m’intimide un peu… Et me voilà au début du chemin le plus ardu que j’ai fait jusqu’ici.

Ca commence fort avec des passages assez techniques, par endroit il y des câbles pour se tenir. Si je n’avais pas 16 ou 18 kilos sur le dos, je m’amuserais mais là c’est assez éprouvant et j’appréhende la descente le lendemain. Le chemin est ensuite plus facile, mais la montée me semble interminable. Le moral revient lorsque j’aperçois enfin le refuge, et retombe peu après quand je me rends compte que j’en ai encore pour près d’une heure de lacets dans ce torrent de pierres où l’on distingue à peine le chemin (soit dit en passant, le balisage est très bien fait, je n’imagine pas le boulot que ça a du être de créer ce sentier).

J’arrive enfin au refuge Adèle Planchard, à 3169 mètres d’altitude, nommé d’après une passionnée d’alpinisme qui légua sa fortune pour la construction de cet abri au début du 20ème siècle.

Après plusieurs nuits en bivouac, c’est étrange de trouver autant de confort à une telle altitude : Une salle commune agréablement chauffée par le soleil et de vrais lits avec des couvertures pour la nuit, le grand luxe ! Il y a même une guitare, j’en profite pour jouer un peu avant d’être rejoint par 3 alpinistes qui pensent aller faire un tour sur le glacier le lendemain.

Jour 6

15 km | 164m de dénivelé positif | 1658m de dénivelé négatif

Je pars du refuge à 6H50. Mon appli de rando (maps.me) m’estime 5H de marche pour rejoindre l’axe Briançon – Grenoble, la grande route du coin. J’ai dans l’espoir de pouvoir rentrer à Montpellier aujourd’hui… Quel parcours !

Bien reposé, la descente se déroule beaucoup plus tranquillement que prévu. Je prends mon temps, et paradoxalement je vais assez vite. Une petite baignade en passant près du torrent puis je marche jusqu’à Villar-d’Arène, fin de ma rando. Je suis pris en stop en moins de 5 minutes par un charmant couple en vacances. Lui est fan de jeux vidéo, je lui offre une clé de Seeds of Resilience, il est ravi !

Ils me déposent à Grenoble d’où je choppe un covoiturage vers Montpellier. Mission accomplie !

Bilan de la rando

90,5 km | 6001m de dénivelé positif | 5324m de dénivelé négatif

Clairement ma plus grosse rando jusqu’ici. La première fois que je pars seul aussi longtemps, j’ai apprécié suivre mon rythme et n’avoir à me soucier que de moi. La compagnie et le partage m’ont manqué.

Mon sac était trop lourd, j’ai notamment emporté trop de nourriture. Je pense pouvoir aussi gagner 2 kilos en achetant un meilleur sac à dos et un sac de couchage plus léger (mais plus cher bien sur).

À part ça j’ai emmené très peu de choses qui ne m’ont pas servi, notamment en terme de vêtements j’ai pris juste ce qu’il me fallait.

Et bien sur, c’était magnifique, ça m’a ressourcé, vivement la prochaine fois 🙂